Schmitronic
Réparations d'appareils électroniques vintage
Réparations de 3 amplificateurs Simplex IPC AM-1080
Arrivent 3 amplificateurs à tubes ... bizarres ! Ils pèsent très lourds et leurs câbles extérieurs démontrent une installation en rack. La plaque d'identification mentionne "International Projector Company" IPC ...
Donc ce sont les systèmes d'amplification audio d'un ancien ... cinéma ! Ils sont identifiés "Left", "Center" et "Right", très clair. C'est du matériel américain (donc en 115V) sous licence Western Digital. Quelques recherches internet sur le modèle AM-1080 ne donnent ... quasi rien ! Après des recherches beaucoup plus approfondies je découvre le site www.film-tech.com, spécialisé dans les informations techniques d'équipements de cinéma.
Ces amplis font partie d'un ensemble complet de projection appelé "Simplex" qui est tout sauf simple, il suffit de jeter un coup d'œil au catalogue de l'époque publié en ... 1955 ! On y trouve en 139 belles pages les détails du système de projection, les préamplis, amplis, haut-parleurs, alimentations, boitiers de commutations ... tout sauf l'ampli que j'ai à restaurer ! L'ampli n'est pas dans la catalogue, mais le site publie bien le schéma ! Alléluia !
Comme c'était des amplis professionnels prévus pour fonctionner des soirées entières, l'objectif est de les restaurer pour voir la qualité sonore et d'en faire éventuellement un système stéréo (voire triphonique) haut de gamme. L'idée n'est pas idiote car manifestement certains les restaurent et essaient de les vendre bien chers sur eBay.
A première vue les 3 appareils sont en mauvais état : composants manquants (condensateurs et tubes), cassés ou remplacés, fils coupés, ... Je commence par un nettoyage, on y voit déjà plus clair. Sur la plaque d'identification, il est indiqué 35W et sur le plan il est inscrit 175W ! Les 35W sont peut-être la puissance musicale mais pour un ampli haute puissance ce n'est pas beaucoup, par exemple son petit frère le AM-1026 est annoncé à 60W ! Et si c'est la consommation électrique et qu'elle est bien de 175W sous 115V, les petits transformateurs-convertisseurs habituels ne suffiront peut-être pas !
Ampli 1 "Center"
Je commence par travailler sur l'ampli "Center", car il en meilleur état. Grâce au catalogue je peux repérer les fonctions et démonter le gros câble avec ses cosses. Du coup je comprends pourquoi il y a un trou dans le châssis : le petit transfo d'adaptation symétrique/asymétrique d'entrée a disparu ! Je vais donc adapter un peu le design pour permettre une entrée asymétrique directe (un condensateur de 33nF/400V suffit). Je découpe et monte une plaque en aluminium au dessus de ce trou du châssis et y visse la fiche RCA audio in et les 2 bornes HP, et j'installe un câble secteur avec terre.
Vu l'âge, l'état et parfois l'absence des gros condensateurs électrochimiques, je décide de les remplacer tous. Mais je laisse les vieilles "bouteilles" en place, c'est joli et mieux que de faire apparaitre de grands trous dans le châssis ! Je remplace ainsi les 5 condensateurs principaux, dont un de 4µF ... 600V ! Il faut le trouver et il faudra surtout faire attention quand l'ampli sera sous tension et même après extinction ! J'ai également repéré une énorme double résistance de puissance qui est HS (en bleu sous le châssis). Elles imposent une charge minimum pour les alimentations haute tension. Je recalcule les puissances dissipées (6W et 2W) et je les remplace par 2 résistances de 10W, on verra jusqu'où elle vont chauffer.
Hors machine, je teste les filaments de tous les tubes et je les alimente : 5V pour les diodes et 6,3V pour les autres. Une fois chaud, je vérifie que les résistances entre anodes, grilles, cathodes et filaments restent à l'infini. Ces mesures simples ne prouvent pas le bon fonctionnement du tube mais garantissent que le tube n'est pas gravement endommagé et qu'il ne va rien détruire. Je remets un bon fusible et remplace l'interrupteur qui est HS, tous les enroulements ont l'air bons, la machine est prête pour l'allumage.
Je l'alimente graduellement jusqu'en 115V, tous les filaments sont OK, mais pas les 2 alimentations haute tension :
- l'alim 300V démarre bien puis tombe doucement à 165V
- l'alim 500V indique 620V et 690V sur les 2 enroulement d'entrée, et après quelques secondes, j'ai un bruit inquiétant dans le transfo et je coupe de suite ...
Quelque chose me semble bizarre, mais je ne comprends pas et je suis un peu perdu pendant un moment. Je revérifie très attentivement le câblage réel et le compare au schéma et je finis pas détecter qu'il y a une inversion des 2 double enroulements haute tension ! Toutes les bornes du transfo principal sont numérotées de 1 à 16, et d'après le schéma les bornes 2-4-6 devraient donner 2x300VAC ... or dans la machine je mesure 2x600VAC ! Et je mesure les 2x300V sur les enroulements 8-10-12 ! Erreur de schéma ou de câblage dans cet exemplaire ? Seule manière de savoir : mesurer sur les 2 autres exemplaires. Aussitôt pensé, aussitôt fait et j'ai ma confirmation : les 2 autres transfos sont câblés et donnent les tensions conformes au schéma.
DONC ce transfo n'a jamais été câblé correctement à l'INTERIEUR du transfo ! Une erreur de montage d'usine avant même la construction de l'ampli ! Il n'y avait pas beaucoup de contrôle qualité à l'époque on dirait, car lors de tests l'anomalie aurait dû être détectée ! C'est d'autant plus incompréhensible, car cet ampli a été utilisé ! Mais vu les tolérances des composants, il a sans doute réellement fonctionné, sans griller, mais à moitié de la puissance par exemple, et peut-être que personne ne s'en est rendu compte !?
J'ai donc modifié le câblage pour aller chercher les bonnes tensions sur les bonnes bornes sans tenir compte du schéma ... et j'ai allumé ... et cela fonctionne ! Fou, non ? Cet ampli, fabriqué autour de 1955, fonctionne correctement pour la 1ère fois en 2024, soit après quasi ... 70 ans ! Encore un coup fumant qu'on ne m'avait jamais fait !
Constatations et conclusions :
- les composants que j'ai achetés sont bons (condensateurs 450 et 600V, résistances de puissance), rien n'a explosé !
- le montage des fiches RCA, HP et secteur est propre et correct
- ma modification du design, due à l'absence de transformateur symétrique/asymétrique d'entrée, fonctionne
- les tubes et autres composants sont bons, même si les tensions mesurées sont assez différentes de celles attendues sur le schéma, mais ces designs sont robustes et s'auto-équilibrent
Par contre au niveau de l'utilisabilité confortable dans une chaine stéréo, j'ai des doutes :
- la consommation est de 210W ! L'appareil peut servir de chauffage dans la pièce d'écoute !
- le transfo 235V -> 117V doit fournir les 210W et il chauffe et fait du bruit, il en faudra 3 de 250W ... ou 1 de 750W !
- le choke de l'alimentation 600V de l'ampli fait du bruit, pourtant il n'est pas en surcharge. Je l'ai resserré, le bruit diminue, mais ça reste non négligeable et désagréable. J'ai alors monté le choke sur silent blocs en caoutchoucs et c'est beaucoup mieux, quasi inaudible.
- l'entrée n'est pas très sensible, avec 840mVpp en entrée, j'ai 5,5Vpp en sortie, soit un gain de 6,5 = +16dBV. L'entrée se fait via un pont de résistance 820k + 220k, don cle signal est pas mal atténué. Je peux mettre un potentiomètre de niveau pour adapter le niveau. Mais ce système Simplex était prévu avec un préampli, donc le gain a sans doute toujours été faible.
- une des 2 résistances de puissance de 10W que j'ai remise chauffe et se stabilise à 150°C ! Elle dissipe 6W mais est construite pour dissiper au maximum 10W, donc en principe c'est OK, mais il faudra voir à long terme si elle résiste.
L'objectif de base était de savoir si le son allait être bon et la réponse est clairement : oui. Il reste à restaurer les 2 autres amplis.
Ampli 2 "Right"
Comme avec le 1er ampli, je commence par enlever le gros câble de connexions de rack et à recâbler avec : fiche secteur, terre, plaquette de support, montage de l'entrée RCA (et adaptation du circuit d'entrée) et des bornes de sorties haut-parleur. Je remplace tous les condensateurs électro-chimiques de filtrage d'alimentations, remets des résistances de puissance et je ressoude également tous les fils coupés ou cassés.
A l'allumage toutes les tensions sont OK ! Et l'ampli fonctionne bien : il consomme moins (150W), silence total sans signal et meilleur gain avec de l'audio : 9,3 = +19dBV. Il faudra que je cherche pour augmenter le gain de l'autre ampli et l'aligner. Celui là a été facile à remettre en route et le son est bon !
Ampli 3 "Left"
J'attaque le dernier ampli, le plus mal en point et incomplet : il manque les 2 tubes diodes, mais sous le socket du tube 540V je vois que 2 diodes silicium ont été soudées. Pour éliminer le tube ou pour une autre raison ? Je les teste et une diode est claquée ! Ce sont des BY227 vertes ... de 100mA max alors que chaque tube de puissance 807 en demande déjà entre 50mA et 80mA au repos et peut facilement monter à 150mA ! J'enlève ce bricolage farfelu et me procure les 2 tubes diodes : j'en ai un dans mon stock et un ami me fournit le 2ème.
Bizarrement, il y a une grosse double résistance montée verticalement au dessus du châssis, elle n'existe pas sur les 2 autres amplis. Je suis les fils : ils sont connectés en parallèle sur la même résistance sous châssis. C'est une résistance de charge de l'alimentation 540V, à connecter si le préampli Simplex n'est pas raccordé, ce qui est le cas ici. L'originale est claquée (comme sur les 2 autres amplis) mais celle de remplacement qui a été montée sur le châssis est morte aussi ! Décidément le design était sous-dimensionné. Je démonte la résistance extérieure et installe 2 résistances de puissance 10W sous le châssis, de la même manière que sur les 2 amplis précédents.
J'avais déjà alimenté le transfo de cet ampli (pour comparer avec le 1er qui avait son erreur de câblage) j'avais constaté que je n'avais pas le point central d'un des 2 enroulements haute tension (pt. 10). Je revérifie et confirme que la connexion doit être cassée à l'intérieur du transfo et donc au lieu d'avoir 2 x 320V à envoyer sur le tube à double diode, j'ai 1 x 640V ! Aïe, ça c'est très ennuyeux. Je cogite bien à quelques solutions avec des résistances en série ou en pont pour établir un point central "virtuel", mais je me doute que cela ne fonctionnera pas, car les tensions sont élevées et même avec de faibles courants, les puissances à dissiper seront trop élevées. Mettre un autre transfo pour ce besoin spécifique ? Non, cela va être très cher et il n'y a pas de place pour l'installer sous le châssis. Dernier espoir, démonter le transfo et espérer pouvoir récupérer le fil manquant, avec le risque d'abimer complètement l'ensemble du transfo. Je décâble toutes les bornes mais avant je prends des photos et vérifie bien la conformité des connexions avec le schéma ... les 15 bornes sont bien numérotées et vont jusque ... 16 ! C'est quoi ce Binz ? Décidément ces transfos sont bizarres. Voyez-vous l'anomalie sur la photo ci-dessous ?
Il manque le chiffre 13 ! Les ingénieurs américains des années 1950 étaient ... superstitieux ! Non, je le crois pas : on est dans le domaine de la science, pas des croyances ! Une petite recherche sur le net confirme par exemple que les Américains sont en moyenne plus superstitieux que les Français. Un des effets est qu'il n'existe pas de 13ème étage dans les hôtels et autres bâtiments ! Pour un étage d'hôtel, je peux encore à la limite comprendre car cela concerne certains clients crédules qui pourraient être mal à l'aise. Mais sur un transfo caché dans un châssis logé dans une armoire technique que personne ne voit, franchement ? C'est du délire, non ?
Bref, je dessoude complètement le transfo et le sort du châssis, je démonte le capot du transfo et repère le fil cassé. Il a bien brûlé à la cosse, sans doute suite à une soudure fissurée, mais à l'ohmmètre l'enroulement est bon, j'ai bien un point milieu ! Hourrah ! Je rallonge délicatement le bout de fil qui sort de l'enroulement, je le pince dans une cosse que je soude solidement sur l'œillet n°10. Je referme le capot et teste le transfo à vide ... et toutes les tensions sont bonnes !
Je remonte le transfo dans la machine et ressoude proprement toutes les connexions. Je vérifie mais finalement je remplace tous les condensateurs électro-chimiques. Je suis surpris avec le condensateur C204, il devrait faire 50µF/50V, mais quelqu'un l'a remplacé par un ... 1.250µF/25V ! Tout faux, certains font vraiment n'importe quoi ! J'ai mis un 68µF/100V, ça c'est correct ! J'allume et vérifie cette fois les tensions continues, et je mesure avec grand plaisir que l'alim 320V est OK. Par contre, l'alim 540V grogne, je coupe de suite. L'enroulement 5V de chauffage du filament de cette alim est OK, mais je finis par me rendre compte qu'il y a une fuite vers la masse à l'intérieur du transfo, ce qui provoque une consommation anormale et empêche le tube diodes 540V de fonctionner ! Zut !
Mais maintenant je comprends pourquoi il y avait 2 diodes silicium à la place du tube. Comme l'enroulement 5V n'est pas utilisable, 2 diodes silicium étaient un solution simple à condition de mettre des diodes suffisamment robustes ! Je pourrais mettre deux diodes silicium 1.200V/3A : il n'y aurait plus ce tube diode et plus du tout besoin de cette alim 5V. Mais on appliquerait alors plus de 600V instantanément au condensateur de filtrage et à l'anode des tubes de puissance ... encore froids, ce qui n'est pas bon car on a un risque d'arc électrique. De plus, comme on dépasse les 600V il faudrait aussi changer le condensateur de filtrage et les tubes de puissance 807 seraient dans d'autres conditions de fonctionnement, ils seraient polarisés différemment et chaufferaient plus, pas bon ça. Et pour finir, c'est moins authentique. Cette solution ne me plait pas du tout.
La dernière possibilité* qui me vient à l'esprit est d'installer un transfo 5V/2A auxiliaire. J'avais récupéré un transfo auxiliaire lors de la réparation d'un préampli Tektron : sous 230V d'entrée il donne 2x6,3V au secondaire. Alimenté en 115V et en raccordant les 2 enroulements secondaires en série, j'obtiens ... 4,6V ! Aurais-je de la chance ? J'ai branché ... et cela fonctionne parfaitement, le filament chauffe bien et j'ai mon 540V en sortie du tube diodes ! Il y a tout juste la place sous le châssis pour ce petit transfo auxiliaire. Une vraie chance sur ce coup là !
Toutes les alimentations sont bonnes, les filaments rougissent, j'entends le léger souffle caractéristique dans le haut-parleur, j'ai du son ! Mais je déchante rapidement, un signal sinus à bas volume sort avec une grosse distorsion visible à l'oscilloscope (l'oscillation inférieure est aplatie). Et dès qu'on monte un peu le volume ou qu'il reçoit une impulsion, l'ampli part en oscillation ! Argh ! Pas bon ça. Je revérifie les composants et découvre une résistance d'anode (R 11-11) d'une des 2 triodes du tube 6SL7GT qui est claquée, ça m'avait échappé. Après remplacement et la distorsion et le départ en oscillations ont disparu ! Super.
Cette fois l'ampli fonctionne, mais il reste un ronflement 50Hz inhabituel et qui ne me plait pas du tout, mon instinct me dit qu'un ou plusieurs composants souffrent. J'observe attentivement les températures sous le châssis et surveille l'allure des tubes. Après une minute je vois à travers le verre de la double triode 6SN7GT que la plaque grise (l'anode) rougit ! C'est un "red-plate" ! Je prends 2 photos (voir ci-dessous) et coupe immédiatement l'ampli, car je sais qu'un tube ne peut pas supporter cette situation très longtemps. Lorsque la plaque d'anode rougit c'est que le courant d'anode est beaucoup trop élevé, quasi toujours à cause d'une tension de bias erronée. La grille ne freine pas suffisamment les électrons entre la cathode et l'anode et le tube s'emballe, le courant est maximum, la plaque chauffe, vire au rouge, se dilate et détériore très vite l'ensemble de la structure interne du tube.
Le circuit de bias de cette double triode est complexe :
- les tensions de cathodes (Vk) sont déterminées par le point milieu d'une résistance de puissance réglable (R1000)
- les tensions de grilles (Vg) proviennent du fameux point milieu n°10, via une résistance de grille
Le bias est la différence de tension entre la tension de grille et de cathode. D'après le schéma Vg = -34V et Vk = -24V donc le bias doit être de -10V, ce qui est conforme avec les recommandations du constructeur dans la datasheet. Or ici je mesure Vg = -48V et Vk = -41V donc un bias de -7V, bien trop faible pour limiter le courant d'anode avec une tension d'anode de 310V ! Au lieu des Ia = 9mA recommandé on se retrouve hors des courbes de la datasheet avec un courant estimé à 20mA ! C'est beaucoup trop !
Depuis le début j'avais remarqué que le point de réglage du bias sur la résistance était en butée du côté le plus négatif alors que sur les 2 autres amplis le point de réglage était au 1/3. Je n'y avais pas porté attention car je pensais que c'était toujours le réglage d'usine. Maintenant quelqu'un a peut-être essayé de réparer cet ampli sans trop comprendre ? J'ajuste ce réglage à vue comme sur les 2 autres amplis ... et hop je me retrouve avec Vk = -27V déjà bien plus proche du -24V indiqué sur le plan !
Néanmoins le bruit de fond bizarre est toujours là et après un certain temps, plus long qu'avant, le tube rougit toujours ... zut. Je mesure Vg = -35V donc j'ai un bias de -8V, toujours trop faible pour limiter le courant d'anode. Je cherche et bizarrement je mesure une chute de tension de 2V sur chaque résistance de grille ... donc il y a un courant qui traverse ces résistances ce qui est ... impossible ! En effet, il n'y a JAMAIS de courant de grille, c'est la tension de grille qui régule le courant d'anode. Avec 2V sur 1Mohms, on obtient un courant de ... 2µA ! Étonnement ce courant quasi insignifiant suffit à provoquer une chute de tension qui bouleverse fortement le bias ... oui 2V suffisent. Seule possibilité au vue du schéma : une fuite dans les condensateurs de découplages (C 13-13 et C 14-15 de 50nF) ! Il y a une différence de tensions aux bornes de ces capas de +133V et -37V soit 170V, et vu l'âge des composants ce n'est finalement pas surprenant qu'ils fuient. Je les remplace et bingo, toutes les tensions se mettent correctement en place (-37V et -27V) et le tube ne rougit plus ! Et ouf le tube n'a pas été détruit ! Et le ronflement a disparu en même temps ! Les anciens condensateurs mesurent toujours comme étant OK, alors que c'est faux ! Problème indétectable.
Cette fois le 3ème ampli fonctionne très bien, malgré tous les soucis de départ ! En fait je pense que quelqu'un avait essayé de le réparer, mais n'y est jamais arrivé et a peut-être fait plus de dégâts encore. J'ai revérifié les 2 autres amplis et les tensions de grilles étaient un peu hors spécifications, du coup j'ai remplacé tous les condensateurs de découplages ... et tous les bias sont maintenant dans les normes !
Normalisation des gains des 3 amplis
Voilà, j'ai 3 amplis fonctionnels mais avec des gains très différents : 3,6, 9,5 et 6,3, soit +11, +20 et +16 dBV. L'échange de tubes ne change rien aux gains. C'est en fait normal car le gain d'ensemble est déterminé par 2 boucles de rétroaction (R 1-1 et R 18-18). R 1-1 manque sur un ampli, je remonte une résistance ... et cela ne change rien. J'ai l'impression que cette boucle fonctionne plutôt comme un compresseur qui entre en action à fort volume. J'ai doublé la résistance R18-18 et là le gain augmente bien, il double quasi. Mais comme les 3 résistances ont la même bonne valeur, je ne souhaite pas tricher et je continue à chercher pourquoi les gains sont si différents.
Puis je me suis dis qu'il reste quand même quelques vieux condensateurs qui sont sans doute complètement hors spécifications et qu'il serait également utile de remplacer. Surtout celui de 10µF sur la résistance de cathode (C 7-7) car il doit avoir un impact sur le gain AC. Bien sûr cela prend un certain temps et il faut être concentré pour ne pas faire d'erreur. Le résultat sonore est incroyable : les amplis ont gagné en bande passante, netteté et gain, mais surtout ont des caractéristiques quasi identiques ! Ils sont maintenant quasi comme lors de leur sortie d'usine.
Les gains sont passés à 37, 52 et 38 soit +31, +34 et +32 dBV ! C'est beaucoup plus proche. Silence total au repos et quel punch à fort volume, ça tape dans les basses et pas l'ombre d'une distorsion !
Conclusions :
- ne pas se fier aux apparences : au départ, vu l'état d'abandon des 3 amplis. En fait je n'imaginais pas les remettre en route ou alors avec un qualité moyenne
- il faut réutiliser le matériel professionnel : vu l'usage ces équipements se devaient d'être robustes et il le sont vraiment, le design est bon, la documentation aussi, la structure interne est claire et le câblage est très bien réalisé, j'ai rarement vu ça
- se fier à son instinct : le ronflement bizarre m'a alerté d'une anomalie, sans cela je n'aurais sans doute pas détecté le "red-plating" ou trop tard pour la survie du tube
- il faut toujours remplacer TOUS les condensateurs dans un équipement à tubes, il est inutile de les mesurer car cela donne de faux espoirs, ils sont d'office trop vieux et ne peuvent plus être bons
- être persévérant paie : le coup du transfo mal câblé d'origine m'a demandé un temps certain pour comprendre, et démonter le transfo avec son fil perdu a demandé beaucoup de travail, mais qui ne tente rien n'a rien
- travailler sur plusieurs modèles d'un même appareil facilite la restauration de l'ensemble car on peut comparer !
Bref, un formidable projet !
* A la lecture de cette page, mon ami Gaston m'informe que mettre des diodes silicium n'est finalement pas un problème, d'ailleurs les tubes diodes à chauffage direct sont opérationnels en quelques secondes, donc l'alimentation haute tension est disponible avant que les tubes de puissance ne soient chauds. D'ailleurs, il existe des sockets de tubes avec des diodes silicium vendus pour remplacer n'importe quel tube diodes.